Lumpenprolétariat

Publié le par Winston Morgan Mc Clellan

   Dans le 18 brumaire de Louis Bonaparte, Karl Marx, témoin de son temps, évoquait le « Lumpenprolétariat » qu’il décrivait en ces termes :

   « Dans ces voyages, que le grand Moniteur officiel et les petits Moniteurs privés de Bonaparte ne pouvaient moins faire que de célébrer comme des tournées triomphales, il était constamment accompagné d'affiliés de la société du Dix-Décembre. Cette société avait été fondée en 1849. Sous le prétexte de fonder une société de bienfaisance, on avait organisé le lumpenprolétariat parisien en sections secrètes, mis à la tête de chacune d'entre elles des agents bonapartistes, la société elle-même étant dirigée par un général bonapartiste. A côté de «roués» ruinés, aux moyens d'existence douteux et d'origine également douteuse, d'aventuriers et de déchets corrompus de la bourgeoisie, on y trouvait des vagabonds, des soldats licenciés, des forçats sortis du bagne, des galériens en rupture de ban, des filous, des charlatans, des lazzaroni, des pickpockets, des escamoteurs, des joueurs, des souteneurs, des tenanciers de maisons publiques, des portefaix, des écrivassiers, des joueurs d'orgue, des chiffonniers, des rémouleurs, des rétameurs, des mendiants, bref, toute cette masse confuse, décomposée, flottante, que les Français appellent la bohême. C'est avec ces éléments qui lui étaient proches que Bonaparte constitua le corps de la société du Dix-Décembre. «Société de bienfaisance», en ce sens que tous les membres, tout comme Bonaparte, sentaient le besoin de se venir en aide à eux-mêmes aux dépens de la nation laborieuse. Ce Bonaparte, qui s'institue le chef du lumpenprolétariat, qui retrouve là seulement, sous une forme multipliée, les intérêts qu'il poursuit lui-même personnellement, qui, dans ce rebut, ce déchet, cette écume de toutes les classes de la société, reconnaît la seule classe sur laquelle il puisse s'appuyer sans réserve, c'est le vrai Bonaparte, le Bonaparte sans phrase. »

   Dans ce court passage, nous avons à la fois une définition du Lumpenprolétariat, ou autrement appelé « racaille », mais aussi, le programme politique de l’Etat providence ou de la république populaire.

 

   Sur la définition, elle me semble très claire et ne souffre d’aucune ambigüité :

« A côté de «roués» ruinés, aux moyens d'existence douteux et d'origine également douteuse, d'aventuriers et de déchets corrompus de la bourgeoisie, on y trouvait des vagabonds, des soldats licenciés, des forçats sortis du bagne, des galériens en rupture de ban, des filous, des charlatans, des lazzaroni, des pickpockets, des escamoteurs, des joueurs, des souteneurs, des tenanciers de maisons publiques, des portefaix, des écrivassiers, des joueurs d'orgue, des chiffonniers, des rémouleurs, des rétameurs, des mendiants, bref, toute cette masse confuse, décomposée, flottante, que les Français appellent la bohême. »

   Le Lumpenprolétariat, ce sont ceux qui, dans les quartiers populaires, parasitent la société, vivent du larcin (ou délinquants). Ils ont en commun avec la bourgeoisie la même vénalité, le vice, et le cynisme, mais sans pour autant partager le même confort matériel. Le lumpenprolétariat, c’est aussi le bras armé de la bourgeoisie, qui lui permet d’avoir toujours emprise sur le prolétariat :

   « La République bourgeoise l'emporta. Elle avait pour elle l'aristocratie financière, la bourgeoisie industrielle, les classes moyennes, la petite bourgeoisie, l'armée, le lumpenprolétariat organisé en garde mobile, les intellectuels, les prêtres et toute la population rurale. »

   Marx constate ensuite que c’est par une association de bienfaisance, la société du dix décembre, que Louis Bonaparte recrute et manipule cette populace à son intérêt.

« Recevoir de l'argent sous forme de cadeaux ou de prêts, c'était là la perspective au moyen de laquelle il espérait séduire les masses. Offrir et emprunter de l'argent, c'est à cela que se réduit toute la science financière du lumpenprolétariat, qu'il soit de condition distinguée ou de condition commune. C'est à cela que se réduisaient les ressorts que Bonaparte savait mettre en mouvement. Jamais prétendant ne spécula plus platement sur la platitude des masses. »

 

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